La palette de… Orane Sigal

« C’est avec le papier découpé que tout a commencé. Un artiste en particulier m’a menée à cette pratique : Matisse. Son travail de simplification de la forme, du dessin et de la découpe m’inspire depuis toute petite. Son rapport aux motifs et à la perspective se retrouve dans mon travail. Chez lui, tout est frontal, ce sont des plans superposés les uns sur les autres, comme un patchwork. C’est une manière de déconstruire toutes les notions de perspectives qu’on apprend en école d’art. Ma façon actuelle de travailler en aplat de couleurs, c’est l’héritage de mon travail du papier découpé. Je ne crée jamais avec des contours, mais avec la couleur et la lumière. »

« Il m’a beaucoup marqué quand j’étais étudiante, c’est sans doute mon réalisateur préféré. On retrouve d’ailleurs l’art du papier découpé dans son travail, notamment pour le film Princes et Princesses qu’il a entièrement réalisé ainsi. Même dans ses projets réalisés en numérique, on retrouve cette inspiration, comme dans Azur et Asmar. Le travail en ombres chinoises, avec peu de personnages vus de face, mais aussi le côté figé des formes, les décors très graphiques, tous ces éléments m’ont amenée à travailler aujourd’hui à la gouache et au marqueur Posca, où la couleur provoque la forme et non l’inverse. »

« Je m’éloigne volontairement de la réalité dans mes créations, soit par la couleur, soit par la forme, qui sont complètement réinterprétées. Je le tiens de l’art naïf, qui développe un monde extérieur décalé, loin de la réalité. Nombreuses sont les personnes qui évoquent le Douanier Rousseau en regardant mon travail. J’apprécie dans ses tableaux ce côté irréaliste avec des proportions non respectées, cet aspect figé qui me touche, tous ces détails qui foisonnent et surtout la narration entre les personnages. Leur expression raconte une histoire, comme des illustrations jeunesse. »

« Frida Kahlo développe un art complet, presque théâtral : l’artiste est devenue actrice de son propre tableau, sa propre muse. Sa personnalité se ressent dans chaque détail de ses œuvres, mais aussi dans ses vêtements, sa Maison bleue, son atelier… Je suis impressionnée par sa force du dessin et sa passion pour l’art malgré une vie très rude, mais aussi par sa manière de mettre ses tripes sur le papier. C’est une véritable mise à nue publique, très crue. Elle fait aussi un lien direct entre la nature, les animaux et l’humain, que l’artiste inclut dans cette même nature, afin de rappeler qu’elle est le fondement de ce que nous sommes. »

« J’ai beaucoup voyagé dans ma vie, ce qui a grandement participé à mon style graphique. J’ai pu découvrir des destinations particulièrement colorées : j’ai vécu en Colombie, à La Réunion, et j’ai été en Bolivie, au Pérou, à Cuba, bientôt au Mexique. Quand je pars en voyage, je n’ai pas forcément de carnets, mais je prends beaucoup de photos, des détails du quotidien dont je peux m’inspirer. J’ai eu l’occasion de réaliser une immense fresque dans une école primaire au Kenya. Cette expérience est un vrai tournant dans mon travail, qui me pousse à apporter de la couleur dans la vie des gens, et les faire voyager à ma manière. »